Cotisations et coût des AT/MP pour les entreprises
Docteur Jacques DARMON, association RAMAZZINI, janvier 2023
La branche AT/MP de l’assurance maladie est financée exclusivement par les cotisations patronales. Les cotisations ne sont, bien sûr, pas les mêmes pour une toute petite entreprise que pour un grand groupe. Nous vous expliquons ici comment fonctionne le mécanisme de financement.
Modalités de cotisation AT/MP des entreprises
Les cotisations des entreprises pour les accidents du travail et les maladies professionnelles sont déterminées en fonction de l’effectif des établissements et des entreprises :
s’il est de moins de 20 salariés elles sont soumises à un taux collectif. Taux qui varie selon l’activité et le code risque de l’entreprise ;
si l’effectif est compris entre 20 et 149 salariés, les établissements et entreprises sont soumis à un taux mixte. Ce taux prenant en partie en compte la sinistralité[1], d’autant plus que l’effectif se rapproche de l’effectif maximum ;
enfin, les établissements et entreprises de plus 150 salariés et plus sont soumis à un système de cotisation individuelle uniquement basé sur la sinistralité en termes d’accidents du travail et de maladies professionnelles.
En 2021, sur 19.3 millions de salariés, 52.3% des effectifs salariés travaillaient dans des établissements et entreprises à taux collectif, 16.9% dans ceux à taux mixte et 30.8% dans ceux à taux individuel.
1 Le taux net moyen collectif
En 2023, le taux net moyen collectif pour l’ensemble des établissements et des entreprises français est de 2.24% de la masse salariale des entreprises, en légère hausse par rapport à celui de 2022, 2.23%.
Ce taux net moyen diffère fortement en fonction des codes risques des entreprises, tant pour le taux des établissements et entreprises en taux collectif que pour celles en taux mixte.
2 Les taux de cotisations collective et mixte en 2023
Voici pour les extrêmes en termes de montant des taux de cotisation, le taux qui s’applique à des entreprises ou établissements en fonction de leur code risque ; parmi les secteurs d’activité dont le taux de cotisation est le plus élevé :
les ouvriers dockers maritimes intermittents, soumis au régime de la vignette, et effectuant quel que soit le classement de l'entreprise qui les emploie, des opérations de chargement, de déchargement ou de manutention de marchandises (code risque 63.1AZ), 35% ;
les travaux de couverture, de charpente en bois, d’étanchéité (code risque 45.2JD), 9.17% ;
la manutention, chargement, déchargement, entreposage de marchandises ou fret dans les ports maritimes et fluviaux, et les aéroports (code risque 63.1BE), 8.31% ;
la fonderie de fonte, d'acier moulé ou de fonte malléable. Fabrication de fonte, d'acier, d'articles ou tubes en fonte. Fabrication de radiateurs, de chaudières pour le chauffage central, la cuisine (code risque 27.1 ZF), 8.04% ;
la construction, réparation ou peinture de navires en acier (y compris équipements spécifiques de bord) (code risque 35.1BF), 8.04% ;
autres travaux de gros œuvre (que terrassement et travaux préparatoires paysagers, dont le taux est de 4.10%). Entreprise générale du bâtiment. Construction métallique : montage, levage. Fumisterie industrielle (code risque 45.2BE), 7.66%.
Parmi les taux les plus faibles, on trouve les activités suivantes :
les agents statutaires des industries électriques et gazières (code risque 40.1ZE), 0.17% ;
les caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics (en ce qui concerne les indemnités versées par ces organismes) (code risque 91.1AA), 0.55% ;
les caisses de congés payés dans les ports et dans certaines entreprises de manutention et de transports (en ce qui concerne les indemnités versées par ces organismes) (code risque 75.3CC), 0.55% ;
les organismes et auxiliaires financiers – Bourse de commerce (code risque 65.1AB), 0.75% ;
intermédiaires de commerce en produits agricoles et alimentaires et vente par correspondance sans manutention, ni livraison, ni stockage, ni conditionnement (code risque 51.1NB), 0.81% ;
assurances et auxiliaires d’assurances (code risque 66.0AB), 0.83% ;
activités de télécommunications, y compris les activités de télésurveillance (sans personnel d'intervention sur le site surveillé) (code risque 64.2BB), 0.84.% ;
médecine systématique et de dépistage (y compris les centres interentreprises de médecine du travail) (code risque 85.1CB), 0,87%.
Parmi des taux de cotisation moyens relatifs à certaines activités avec une sinistralité relativement conséquente :
toutes catégories de personnel de travail temporaire (74.5BD), 3.20% ;
les services d'aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…) (code risque 85.3AB), 3.78% ;
l’accueil, hébergement en établissement pour personnes âgées (maisons de retraite…) et pour personnes handicapées (enfants et adultes) (code respectif 85.3AC et 85.3AD), 3.78% ;
action sociale sous toutes ses formes (codes risque 853AB, 853AC, 853AD et 853AE), 3.78%.
1.3. La cotisation individuelle
Uniquement basée donc sur la sinistralité (cf. chapitre 2)
2. Impact de la sinistralité pour les taux mixte et individuel
La sinistralité de l’entreprise ou de l’établissement retentit sur la cotisation de l’entreprise en y intégrant les coûts moyens calculés pour chacun des neuf comités techniques nationaux, d’une part, des arrêts maladie (les incapacités temporaires) en fonction de leur durée et, d’autre part, en fonction des taux d’incapacité permanente.
Taux d’incapacités temporaires (IT) et permanentes (IP) en 2022
Exemple 1 : une salariée d’une société de la chimie se voit prescrire un arrêt de travail pour maladie professionnelle d’une durée totale de 135 jours. La branche AT/MP de l’assurance maladie facturera alors, une seule fois, à son entreprise la somme de 11 973 €.
Exemple 2 : la même salariée de la chimie est consolidée et se voit attribuer un taux d’Incapacité Permanente de 67 % par la CPAM. La branche AT/MP de l’assurance maladie facturera alors à son entreprise la somme de 751 266 €.
Ces coûts moyens sont fournis par un arrêté en général publié en décembre de l’année n pour l’année n + 1. Ci-dessous ceux communiqués par l’arrêté du 26 décembre 2022 pour l’année 2023.
3. Les conséquences de ces coûts
Les entreprises peuvent essayer d’éviter de se voir imputer ces coûts, conseillées par des avocats ou des cabinets spécialisés, en faisant une procédure afin de se voir déclarer inopposable un accident du travail ou une maladie professionnelle.
Les entreprises peuvent demander l’inopposabilité pour le non-respect par la caisse des procédures (respect du contradictoire, communication des décisions, des pièces, etc…) ou bien sur le fond en contestant le caractère professionnel de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle.
Ce contentieux est encore plus fréquent en cas de faute inexcusable (article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale) qui a pour effet, si elle est reconnue :
de doubler le montant du capital pour les taux d’incapacité permanente inférieurs à 10 %
de doubler le montant de la rente pour les taux d’incapacité permanente inférieurs à 50 %
de porter à son maximum la rente pour les taux supérieurs à 49 %.
et de mettre à la charge de l’entreprise, quel que soit le taux d’IP, l’indemnisation d’éventuels préjudices complémentaires.
[1] Addition de tous les accidents du travail et maladies professionnelles dans l’entreprise sur les 3 dernières années.